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Immersion au sein du Front national : la place réservée aux femmes
Immersion au sein du Front national : la place réservée aux femmes
Doctorante en fin de thèse à l’IRISSO / Université Paris Dauphine-PSL, Margherita Crippa a mené une enquête ethnographique de longue haleine. Entre 2013 et 2015, elle a observé plusieurs sections locales du Front national, dans le cadre d’un travail immersif au long cours.
Par ses entretiens et sa participation aux activités partisanes, elle a documenté les dynamiques internes de ces collectifs militants pendant près de six ans. Dans l’un de ces groupes qui lui a offert un accès privilégié au quotidien militant, elle y a analysé la place assignée aux femmes : valorisées pour leur apparence, leur respectabilité ou leur maîtrise de soi, mais cantonnées à des fonctions subalternes.
Son enquête a mis en lumière des usages différenciés du genre et de la classe, façonnés par les contextes locaux, les statuts militants et les besoins stratégiques du parti. Derrière la féminisation de façade, ce sont des hiérarchies persistantes et des formes de pouvoir masculines qui se sont maintenues.
Dans cet entretien à Enflammé.e.s le 11 juin 2025, Margherita Crippa revient sur cette expérience de terrain et ce qu’elle révèle des rouages ordinaires d’un parti en quête de respectabilité.
Femmes et extrême droite : l’effacement du genre, pas des idées
Femmes et extrême droite : l’effacement du genre, pas des idées
Depuis 2012, le vote des femmes pour l’extrême droite ne se distingue plus de celui des hommes. Confirmée lors de la présidentielle de 2022 et des législatives de 2024, cette disparition du « gender gap » électoral marque une rupture dans l’histoire politique française. Marine Le Pen, qui a dirigé le Rassemblement national (RN) de 2011 à 2021, a largement contribué à cette évolution. Jordan Bardella, son successeur, poursuit cette dynamique avec une image plus lisse, séduisante pour une partie des jeunes électrices. Comment le RN a-t-il féminisé son électorat sans renoncer à son logiciel idéologique ?
Dans un entretien à Enflammé.e.s le 6 juin 2025, la politiste Nonna Mayer et la doctorante Noémie Piolat analysent une recomposition électorale profonde, où se mêlent précarité sociale, effets générationnels, sous-cultures numériques et instrumentalisation sécuritaire des droits des femmes.
Féminisme identitaire : l’arme culturelle de l’extrême droite
Féminisme identitaire : l’arme culturelle de l’extrême droite
Depuis 2019, le collectif Némésis, vitrine féminine de la mouvance identitaire française, multiplie les actions spectaculaires et les prises de parole médiatiques au nom d’un « féminisme identitaire ». Se réclamant de la défense des femmes blanches face aux « agresseurs issus de l’immigration », ses militantes dénoncent l’intersectionnalité, ciblent les quartiers populaires et s’opposent aux courants féministes progressistes. Derrière une rhétorique d’apparence égalitaire se déploie une stratégie politique articulée à une vision racialiste du sexisme.
Charlène Calderaro, docteure en sciences sociales et chercheuse au Centre Études Genre de l’Université de Lausanne, consacre ses travaux à l’appropriation du féminisme par l’extrême droite. Dans cet entretien accordé à Enflammé.e.s le 20 mai 2025, elle analyse la généalogie, les ressorts idéologiques et les effets politiques de cette mouvance, qui détourne les luttes féministes pour nourrir un projet nationaliste. En s’appuyant sur une enquête comparative menée en France et au Royaume-Uni, elle montre comment la pénalisation du harcèlement de rue, initialement portée par les militantes féministes, a été intégrée par l’État avant d’être réappropriée — et radicalement redéfinie — par des militantes d’extrême droite. Une lecture lucide, rigoureuse, et nécessaire pour comprendre les recompositions actuelles du champ féministe.
Féminisme dévoyé, agenda réactionnaire : les visages féminins de l’extrême droite
Féminisme dévoyé, agenda réactionnaire : les visages féminins de l’extrême droite
Le 28 avril 2025, Enflammé.e.s s’est entretenu avec Magali Della Sudda, politiste et socio-historienne, chargée de recherche au CNRS et membre du Centre Émile Durkheim (CNRS/Sciences Po Bordeaux). Trois ans après la publication de son ouvrage Les nouvelles femmes de droite (Éditions Hors d’atteinte, 2022), elle analyse la manière dont certaines militantes des droites radicales reprennent les codes du féminisme pour mieux les détourner.
Sous une esthétique soignée et un discours d’émancipation de façade, elles promeuvent un projet politique profondément inégalitaire, identitaire et réactionnaire. À travers elles, c’est l’idéologie de l’extrême droite contemporaine qui se redessine.